Histoire de TVR
Publié : 01 août 2011 23:40
MISE A JOUR LE 04/08/2011
TVR Blackpool Rockets
TVR : Voilà 3 consonnes avec une sonorité qui fait rêver tous les amoureux de voitures de sport et qui résonnent comme « petite bombe britannique au caractère bien trempée dotée d’une motorisation sulfureuse et d’un châssis plus que joueur », bref une marque qui jouit d’une forte notoriété sur la place publique mais assez méconnu tout de même, en tout cas chez nous en France. De l’autre côté de la manche, cette marque fait partie du sacro-saint panthéon de la production anglaise de voiture extrême et jouît d’une réputation assez hors norme (si vous êtes allé aux 24h du Mans vous comprendrez ce que je veux dire).
Mais pourquoi ce nom ? TVR est la contraction du prénom du fondateur (TreVoR Wilkinson), aussi simple que cela !
Les origines
Trévor WLKINSON (1923 – 2008) est né à Blackpool et a quitté l’école à l’âge de 14 ans pour commencer un apprentissage en mécanique dans un garage local. En 1946 il se porte acquéreur d’un atelier de charron (baptisé Trevcar Motors), il souhaite le transformer pour produire des voitures de sport. Comme beaucoup d’artisans de cette époque, Trévor ne peut pas entièrement se consacrer à cette activité, ainsi dans un premier temps il s’occupe de l’entretien et de la maintenance des différents manèges du parc d’attraction de Blackpool (cette ville en Angleterre est une station balnéaire, le parc d’attraction est toujours en activité aujourd’hui). En 1947 il s’associe avec Jack Picard (personnage important dans les débuts de TVR) et Trevcar devient TVR Engineering. Les 2 compères n’ont aucune formation technique poussée, juste leur expérience et leur volonté. A cette époque, le Royaume-Uni venait de sortir de la 2ème guerre mondiale et l’économie était mal au point : tout était à reconstruire. Trévor et Jack tirent parti de cette situation en développant une activité de reconditionnement de camions militaires en camions de transport routier. Donc en 1947, TVR est née !…………………. comme Ferrari
Trévor Wilkinson
On a l’habitude de distinguer 4 périodes dans l’histoire de TVR qui en sont enfin de compte liées aux 4 propriétaires différents de TVR
Ere Wilkinson & Picard : Des prototypes vers la petite série (1947 – 1965)
Les premiers prototypes
TVR commence son aventure automobile par la réalisation d’un prototype en un seul exemplaire sur base de voiture existante (châssis d’Alvis Firebird) : la « Wilkinson Special ». 2 ans après la première TVR est fabriqué en 1949, elle est motorisée par un Ford latéral de 1172 cm3, l’essieu arrière vient d’une Morris 8 et le châssis a été conçu par Trévor en personne : c’est la TVR 1. Cette voiture était destiné à la compétition, mais Trévor n’a pas le temps d’en profiter puisqu’il la vend très peu de temps après à son cousin pour £325 !
Esquisse de la TVR1 par Trévor Wilkinson
Qu’importe les 2 camarades continuent de construire leurs voitures pendant leur temps libre et en 1950 la TVR 2 sort, suivie l’année suivante par la TVR 3, ces 2 modèles sont dans la même lignée que la TVR 1. Sur ces 3 premiers modèles, Trévor en a vendu 2 au final.
TVR n°2 (unique survivante des 3 premières TVR)
Suite à cette première expérience, Trévor se remet en cause et décide d’abandonner son projet de Roadster et de changer son fusil d’épaule en réalisant un châssis à poutre centrale avec une carrosserie en fibre de verre, en fait il décide avec son compagnon d’acheter des carrosseries de fibre de verre et de les modifier pour les adapter sur le châssis. C’est ce principe de construction qui sera retenu pendant de longues années chez TVR : Châssis tubulaire en acier et carrosserie en fibre de verre « maison », tout le reste venant des grands constructeurs (anglais et américain principalement). Les premiers clients de la marque commandaient ainsi un châssis en choisissant un moteur et montaient leur propre carrosserie.
Les premières (très) petites séries
En 1954, TVR décide de lancer son tout premier modèle de série (très limitée) : La Sports Saloon. Elle s’appuie toujours sur un châssis tubulaire à poutre centrale, doté de suspension et du pont arrière de l’Austin A40. Une vingtaine d’exemplaires seront réalisés jusqu’en 1956 avec différents moteurs : A40, Ford 100 E, MG TF 1500, MGA, le plus puissant étant le Lea Francis de 2,5 litres.
L’un des tous premiers clients de TVR aux Etats Unis, Ray Saidel (New Hampshire) demande en 1955 à Trévor de lui construire un châssis avec des suspensions indépendantes à l’avant comme à l’arrière. Pour ce client, TVR crée un nouveau châssis dit « backbone » (constitué d'une épine central), dont la suspension à quatre roues indépendantes est empruntée à la Volkswagen Coccinelle. C'est cette architecture de châssis qui a ensuite été adoptée sur toutes les TVRs. Ce nouveau châssis permet un nouvel aménagement de l’habitacle : Les sièges sont désormais positionnés plus bas améliorant ainsi l’aérodynamique avec un toit plus bas et abaissant le centre de gravité du même coup. Cette nouvelle voiture reçoit aussi de nombreuses pièces issues de la Coccinelle : les roues et les freins qui peuvent ainsi s’adapter sans aucune difficulté aux suspensions. La voiture est ensuite équipée par Ray Saidel d’une carrosserie de fibre de verre et d’un moteur Climax. Il l’appelle la Jomar du nom de ses enfants (« John » et « Margarett »).
TVR Jomar Racer
D’autres voitures sont fabriquées à partir de ce concept, équipées cette fois-ci de roue Dunlop avec des freins Girling. Le moteur reste le Coventry-Climax avec une boîte de vitesse issue de la MGA. La voiture est présentée en 1957 au salon de l’automobile de New York et Ray Saidel devient l’agent de TVR aux Etats-Unis. Elle enregistre un franc succès et déjà plusieurs commandes sont passées, en tout cas beaucoup plus que la capacité de production de l’usine à Blackpool. En effet celle-ci étant destinée à produire des kits qui représentaient les ¾ des ventes, elle ne pouvait fabriquer des voitures, même en petite série.
TVR Jomar Coupé
1958 : Le premier modèle de série : La « Grantura »
Malgré tout, ce succès permet à TVR de développer son activité et en 1956, elle fabrique ses propres carrosseries en fibre de verre, la seule solution pour maintenir des coûts raisonnables pour une si petite production, et continue d’affiner les lignes de la Jomar. 2 ans plus tard le style TVR apparaît avec le nouveau modèle : La Grantura. Ce design sera conservé et décliné pendant plus de 20 ans sur les modèles suivants.
TVR Grantura (mk2 en l’occurrence)
La Grantura est proposée avec un large choix de moteur (Coventry Climax type FWA et type FWE, Ford 100E, BMC B-Series) rendu possible grâce à la grande accessibilité de son compartiment moteur. Pour le reste elle fait appel à des pièces toujours issues des grands constructeurs comme par exemple une direction Ford, des freins tambour d’Austin Healey ou des jantes à rayons et écrou central Dunlop. La ligne issu de la Rochedale a évolué et trouve sa forme définitive à force de retouche et de modification toute empirique.
La première crise
Grâce à l’apport financier de nouveaux associés, les locaux sont transférés dans une ancienne briqueterie en banlieue de Blackpool où TVR peut raisonnablement envisager une production de série. Le succès est au rendez-vous avec ce modèle et le carnet de commande se remplit, malheureusement la production ne suit pas, les commandes finissent par être annulées (même Ray Saidel n’arrive pas à stopper ce phénomène de son côté de l’atlantique) et l’entreprise se retrouve rapidement confrontée à des difficultés financières. Heureusement un groupe de propriétaires généreux et enthousiastes, investit en espèce dans la marque, sauvant l’entreprise du naufrage. A noter que ce genre de sauvetage jalonnera l’histoire de la marque ; les clients eux-mêmes venant au secours de la marque aux 3 consonnes. TVR est alors renommée Layton Sports Car et continue sa production jusqu’au nouveau drame financier de 1961. Un nouveau plan de sauvetage est alors mis en place et la compagnie est renommée TVR Cars avec Trévor Wilkinson comme directeur général
La première « grosse » TVR : La « Griffith »
En 1961, TVR rétablit son marché aux Etats-Unis en nommant Dick Monnich comme agent. TVR vend à nouveau ces modèles aux Etats-Unis et très rapidement l’idée de mettre un V8 dans une Grantura a titillé les américains. Ainsi en 1963 un concessionnaire automobile américain (propriétaire d’une Grantura mk3) qui déjeunait avec Caroll Shelby, a prétendu à celui-ci qu’il était capable de monter le même V8 Ford que les AC Cobra (le 289) dans la Grantura et de surpasser celle-ci. Cet américain ressort de son déjeuner et décide d’aller au bout de son raisonnement. Il s’empresse d’essayer le montage dans une Grantura mais ce fut un échec. Qu’à cela tienne, ce monsieur persévère et demande directement à TVR de lui fournir un châssis sans moteur ni transmission, ce que TVR fait bien évidemment. Au final en retirant des éléments de suspensions et en martelant le châssis pour faire rentrer la nouvelle transmission, il réussit à installer tout ce petit monde sur le châssis. Autant vous dire que la Grantura est transcendée. Le nom de cet américain fou (aussi fou que Caroll Shelby) : Jack Griffith.
Il existe aussi d’autres versions de la naissance de la Griffith :
- Ainsi une Grantura et une AC Cobra se seraient retrouvées côte à côte dans les ateliers de Jack Griffith. Les mécaniciens se seraient alors lancé le défi de faire rentrer le V8 de la Cobra dans la Grantura……..et il est rentré.
- Dick Monnich et Jack Griffith auraient décidé que tout ce que Caroll Shelby faisaient avec une AC, ils pouvaient le faire en mieux avec une TVR. S’appuyant sur une Grantura mk3 1800, ils auraient remplacé le bloc BMC B-Series 1800 par un V8 Ford 289.
Où se trouve la vérité ? C’est difficile à dire, le plus simple étant de choisir la légende qui vous plaît le plus, moi j’ai une préférence pour la première !
TVR, enthousiasmée par l’idée, décide de soutenir Jack Griffith dans l’aventure en lui fournissant des châssis. Après quelques travaux de développement, TVR se met aussi à construire ses propres Grantura avec le même V8 Ford 289. TVR les appellera Griffith 200, à noter qu’aux Etats-Unis elles sont commercialisées sous le nom de Griffith série 200 sans la marque TVR et avec un logo différent. Cette différence de nom semble venir du fait que TVR ai livré à Jack Griffith des kits qui étaient assemblés aux USA et commercialisés séparément du réseau de vente des TVR Grantura de Dick Monnich. Elle est proposée avec 2 motorisations : Le V8 289 en version « normale » qui développe 195 ch ou une version HiPo (High Powered) qui développe 271 ch (le 0-60 mph est abattu en 3,9s dans cette version !). La demande fut telle pour cette concurrente de l’AC Cobra que l’usine fut rapidement submergée de commandes, et la production se trouvait accaparée par la réalisation des éléments de la Griffith.
TVR Griffith (le bossage dû au V8 permet de les distinguer des Grantura)
En 1964, la Griffith 200 est remplacée par la Griffith 400 qui est équipée de série du 289 HiPo. Elle reçoit dorénavant un différentiel Salisbury avec un rapport de réduction plus long lui permettant d’atteindre une vitesse plus élevée que la Griffith 200. Le refroidissement a aussi été amélioré. La Griffith 400 semblait destinée à une belle carrière, malheureusement une grève des dockers de la côte Est en 1965 couplée à des difficultés de livraison par l’usine de Blackpool des éléments pour fabriquer la Griffith 400 et la mauvaise presse de la Griffith 200, firent que celle-ci fut produite en très faibles quantités. Cette même année, la production s’arrête, Martin Lilley à son arrivée chez TVR continuera d’en produire d’avril 1966 jusqu’au début de l’année 1967.
Ces difficultés aux Etats-Unis eurent aussi raison d’un autre projet de Jack Griffith : La 600. Cette voiture n’a rien à voir avec TVR, en effet elle ne reprend aucun élément issu de la TVR Grantura ni d’aucune autre TVR. Pour l’histoire elle a changé plusieurs fois de nom : A sa présentation elle s’appelait Griffith 600, puis Omega et enfin Intermeccanica Italia. Le châssis et la carrosserie ont été conçus par Intermeccanica de Franck Reisner en Italie. Le châssis s’appuie sur celui de l’Apollo-Buick et le moteur est un V8 Plymouth de la Barracuda 1ère génération. La 600 a connu les mêmes difficultés d’approvisionnement (grève des dockers) que la 400, même si Jack Griffith a essayé de contourner le problème en utilisant le transport aérien mais sans véritable succès. Au final 14 exemplaires de la 600 seront produits.
Griffith 600
Les débuts officiels en compétition
Malgré ces difficultés pour la Griffith, le développement de la Grantura a continué en parallèle. Ainsi en 1962, la mk3 est présentée avec des éléments de suspension d’origine Triumph. C’est avec cette version de la Grantura que TVR décide de s’engager dans la compétition, auparavant plusieurs TVRs avaient déjà été engagées par des propriétaires privés. TVRs aligne 3 Grantura aux 12 heures de Sebring et 3 autres Grantura (n°31, n°53 et n°65) aux 24 heures du Mans. L’aventure du Mans va se révéler désastreuse !
La peinture n’est pas encore sèche quand les voitures quittent l’usine !!!, Vers Birmingham les ennuis commencèrent sur une des voitures de course, conduite pour le voyage par Ken Richardson, avec des problèmes de réservoir d'essence (des débrits de soudure se baladaient dans le réservoir et avaient été aspirés dans le tube allant à la pompe à essence !) ce qui obligeait le convoi à s'arrêter fréquemment. Enervé, Richardson, ayant oublié que sa voiture avait des freins compétition (qui devaient être chauds pour bien fonctionner), passa à travers le dernier rond-point de l'autoroute M1, sans dommage heureusement. Arrivé près du Mans, ils cherchèrent un garage pour résoudre le problème d'arrivée d'essence, le garagiste constata que le réservoir était en bon état, les mécanos d'assistance pensèrent que l'essence était « contaminée » et vidangèrent la TVR et cela plusieurs fois ! Enfin un des mécanos eu l'idée de changer le tube entre le réservoir et la pompe à essence ! Au final seul 2 TVRs (n°31 et n°65) se retrouvèrent sur la piste pour les essais, malheureusement, elles se mirent à chauffer dès leur premier tour d'essai, à la fin des Hunaudières. Le jour de la course, l'ambiance était morose, une seule TVR (n°31) était sur la ligne de départ et Peter Bolton ne fit que 3 tours quand la voiture se mit à chauffer et abandonna !
Les 2 Grantura engagés au Mans 1962
Le départ de Trévor Wilkinson
Cette expérience coutât une fortune à TVR et on ne les revit plus ses voitures au Mans…. avant longtemps, pour être précis 41 ans (voir plus bas). D’une manière générale la compétition fut un gros flop pour TVR, avec des voitures sous développées et mal préparées pour l’endurance qui s’avérèrent peu fiables sur la piste, et un coup dur pour ses finances. Une fois de plus TVR se trouve dos au mur, Trévor, réalisant qu’il avait perdu le contrôle de l’entreprise qu’il avait fondé, quitte la société en 1962 en vendant ses parts. Un plan de sauvetage (encore un) est mis sur pied par 2 administrateurs de TVR, des passionnés de la marque et un héritier d’une entreprise de vêtement, Arnold Burton. TVR s’appelle désormais Grantura Engineering. Rapidement le choix de motorisation est réduit et en 1963 un seul moteur est proposé le BMC B-Séries de 1798 cm3. Le design arrière évolue et cette version est appelée mk3 1800S.
Arrière d’une Grantura mk3 1800S
Une TVR italienne : La Trident
Au début de l’année 1963, un homme appelé Trevor Frost rencontre l'équipe de gestion de Grantura Engineering au Pub « Derby Arms », situé à Treales près de Blackpool pour discuter d'un projet qu'il avait imaginé pour un nouveau modèle TVR. Frost est un créateur anglais d'origine italienne et à l'époque, il travaillait à la « Carrosserie Fissore », une entreprise de design à Turin, sous le nom de Trevor Fiore. Assis à une table, Frost dessine son idée sur une serviette de table. Les représentants TVR sont impressionnés. Frost retourne à Turin pour persuader la « Carrosserie Fissore » de construire 2 prototypes de la voiture sous le nom de TVR Trident.
La TVR Trident est un coupé fastback, pas très différente en apparence des Wedges qui apparaîtront beaucoup plus tard. Elle s’appuie sur le châssis des Grantura / Griffith, reçoit une carrosserie en acier avec un capot en aluminium et est motorisé par le V8 Ford de 4,7 litres de 270 ch (le même que celui qui équipait les Griffith 400) associé à une boîte 4 vitesses. Les pneus étaient des Dunlop 72. Cependant le passage du simple dessin sur une serviette de table à une voiture réelle ne fut pas évident et il fallut attendre 2 ans avant que le projet ne prenne forme. Toutefois, les deux prototypes furent terminés à temps pour le salon de l’automobile de Genève de 1965, où elles furent bien accueillies par le public. Les prototypes présentés étaient équipés de nombreuses pièces italiennes : phares arrières et de nombreux accessoires intérieur d’origine Alfa Roméo, les feux avant et les commutateurs électriques étant d’origine Fiat. La nouvelle TVR reçut un accueil chaleureux de la presse spécialisée et le Daily Mail qualifia même la Trident de « plus belle voiture du monde ». A la fermeture du salon de Genève, TVR avait enregistré plus de 150 000 £ de commandes.
TVR Trident n°3
Suite à la présentation au salon de Turin, TVR demande à la « Carrosserie Fissore » de construire 2 voitures supplémentaires, un autre coupé ainsi qu’un cabriolet. Les 2 prototypes présentés au salon deviennent officiellement les voitures de test de TVR sur lesquels les modèles de production doivent se baser. En août 1965, avant même que Fissore ne livre les deux Trident 3 et 4, les espoirs et les rêves de TVR partent en fumée à cause des problèmes rencontrés aux Etats-Unis avec les grèves de 1965 qui entraînent une chute des ventes de Grantura et Griffith Outre-Atlantique. La Trident représentait un investissement financier majeur pour TVR et la perte soudaine d’une clientèle importante aux Etats-Unis conduisit TVR tout droit vers la faillite en cette année 1965 pour la 2ème fois de son histoire. C’est en cette année 1965 que Martin Lilley rachète TVR (nous développons cette partie dans le paragraphe suivant).
Mais qu'est devenue la Trident pendant ce temps? Durant les mois nécessaires à la reprise en mains par Martin Lilley, un flou est intervenu concernant les droits de fabrication de la Trident. Appartenaient-ils à TVR, à Fissore ou tout simplement à Frost? TVR devait de l'argent au « Carrosserie Fissore » et à Frost qui craignaient tous les 2 de lourdes pertes. Un concessionnaire TVR du Suffolk, Bill Last, approcha la « Carrosserie Fissore » pour obtenir les droits de la TVR oubliée. On ne sait pas quelle fut la nature de la transaction, mais toujours est-il que Last s’appropria les droits. Cela lui permit de commander une nouvelle voiture à la « Carrosserie Fissore » et de la commercialiser sous la marque Trident. Le design de la voiture différait sensiblement de la TVR Trident car il reposait sur un châssis d'Austin Healey 3000. De plus la carrosserie était en fibre de verre et non plus en acier. Entre 1966 et 1976 Trident Cars et son successeur Trident Motor Company construisirent 130 voitures.
La Trident fut perdue pour toujours par TVR en 1966. Heureusement Martin Lilley alla récupérer les restes des numéros 3 et 4 chez la « Carrosserie Fissore » et termina les voitures à l'usine. Le cabriolet devint même la voiture personnelle de Martin Lilley pendant un temps.
TVR Trident n°4 Cabriolet
Probablement en raison de leur caractère unique, chaque Trident fut conservée par son propriétaire. Les n°1 et 2 partirent aux USA pendant que les 3 et 4 restèrent en Grande Bretagne. Aujourd'hui les 4 voitures ont survécu, en grande partie grâce aux efforts de Chuck Lynn, un ancien propriétaire de TVR Trident. Très récemment le coupé n°2 et le cabriolet n°4 ont été vendus à 2 Belges. La moitié de la production TVR Trident est donc maintenant localisée en Belgique et il semblerait que les propriétaires actuels souhaitent les garder pour toujours. Après tout la TVR Trident n'est pas seulement une TVR unique c'est aussi une pièce unique de la production britannique de voitures de sport.
TVR Blackpool Rockets
TVR : Voilà 3 consonnes avec une sonorité qui fait rêver tous les amoureux de voitures de sport et qui résonnent comme « petite bombe britannique au caractère bien trempée dotée d’une motorisation sulfureuse et d’un châssis plus que joueur », bref une marque qui jouit d’une forte notoriété sur la place publique mais assez méconnu tout de même, en tout cas chez nous en France. De l’autre côté de la manche, cette marque fait partie du sacro-saint panthéon de la production anglaise de voiture extrême et jouît d’une réputation assez hors norme (si vous êtes allé aux 24h du Mans vous comprendrez ce que je veux dire).
Mais pourquoi ce nom ? TVR est la contraction du prénom du fondateur (TreVoR Wilkinson), aussi simple que cela !
Les origines
Trévor WLKINSON (1923 – 2008) est né à Blackpool et a quitté l’école à l’âge de 14 ans pour commencer un apprentissage en mécanique dans un garage local. En 1946 il se porte acquéreur d’un atelier de charron (baptisé Trevcar Motors), il souhaite le transformer pour produire des voitures de sport. Comme beaucoup d’artisans de cette époque, Trévor ne peut pas entièrement se consacrer à cette activité, ainsi dans un premier temps il s’occupe de l’entretien et de la maintenance des différents manèges du parc d’attraction de Blackpool (cette ville en Angleterre est une station balnéaire, le parc d’attraction est toujours en activité aujourd’hui). En 1947 il s’associe avec Jack Picard (personnage important dans les débuts de TVR) et Trevcar devient TVR Engineering. Les 2 compères n’ont aucune formation technique poussée, juste leur expérience et leur volonté. A cette époque, le Royaume-Uni venait de sortir de la 2ème guerre mondiale et l’économie était mal au point : tout était à reconstruire. Trévor et Jack tirent parti de cette situation en développant une activité de reconditionnement de camions militaires en camions de transport routier. Donc en 1947, TVR est née !…………………. comme Ferrari
Trévor Wilkinson
On a l’habitude de distinguer 4 périodes dans l’histoire de TVR qui en sont enfin de compte liées aux 4 propriétaires différents de TVR
Ere Wilkinson & Picard : Des prototypes vers la petite série (1947 – 1965)
Les premiers prototypes
TVR commence son aventure automobile par la réalisation d’un prototype en un seul exemplaire sur base de voiture existante (châssis d’Alvis Firebird) : la « Wilkinson Special ». 2 ans après la première TVR est fabriqué en 1949, elle est motorisée par un Ford latéral de 1172 cm3, l’essieu arrière vient d’une Morris 8 et le châssis a été conçu par Trévor en personne : c’est la TVR 1. Cette voiture était destiné à la compétition, mais Trévor n’a pas le temps d’en profiter puisqu’il la vend très peu de temps après à son cousin pour £325 !
Esquisse de la TVR1 par Trévor Wilkinson
Qu’importe les 2 camarades continuent de construire leurs voitures pendant leur temps libre et en 1950 la TVR 2 sort, suivie l’année suivante par la TVR 3, ces 2 modèles sont dans la même lignée que la TVR 1. Sur ces 3 premiers modèles, Trévor en a vendu 2 au final.
TVR n°2 (unique survivante des 3 premières TVR)
Suite à cette première expérience, Trévor se remet en cause et décide d’abandonner son projet de Roadster et de changer son fusil d’épaule en réalisant un châssis à poutre centrale avec une carrosserie en fibre de verre, en fait il décide avec son compagnon d’acheter des carrosseries de fibre de verre et de les modifier pour les adapter sur le châssis. C’est ce principe de construction qui sera retenu pendant de longues années chez TVR : Châssis tubulaire en acier et carrosserie en fibre de verre « maison », tout le reste venant des grands constructeurs (anglais et américain principalement). Les premiers clients de la marque commandaient ainsi un châssis en choisissant un moteur et montaient leur propre carrosserie.
Les premières (très) petites séries
En 1954, TVR décide de lancer son tout premier modèle de série (très limitée) : La Sports Saloon. Elle s’appuie toujours sur un châssis tubulaire à poutre centrale, doté de suspension et du pont arrière de l’Austin A40. Une vingtaine d’exemplaires seront réalisés jusqu’en 1956 avec différents moteurs : A40, Ford 100 E, MG TF 1500, MGA, le plus puissant étant le Lea Francis de 2,5 litres.
L’un des tous premiers clients de TVR aux Etats Unis, Ray Saidel (New Hampshire) demande en 1955 à Trévor de lui construire un châssis avec des suspensions indépendantes à l’avant comme à l’arrière. Pour ce client, TVR crée un nouveau châssis dit « backbone » (constitué d'une épine central), dont la suspension à quatre roues indépendantes est empruntée à la Volkswagen Coccinelle. C'est cette architecture de châssis qui a ensuite été adoptée sur toutes les TVRs. Ce nouveau châssis permet un nouvel aménagement de l’habitacle : Les sièges sont désormais positionnés plus bas améliorant ainsi l’aérodynamique avec un toit plus bas et abaissant le centre de gravité du même coup. Cette nouvelle voiture reçoit aussi de nombreuses pièces issues de la Coccinelle : les roues et les freins qui peuvent ainsi s’adapter sans aucune difficulté aux suspensions. La voiture est ensuite équipée par Ray Saidel d’une carrosserie de fibre de verre et d’un moteur Climax. Il l’appelle la Jomar du nom de ses enfants (« John » et « Margarett »).
TVR Jomar Racer
D’autres voitures sont fabriquées à partir de ce concept, équipées cette fois-ci de roue Dunlop avec des freins Girling. Le moteur reste le Coventry-Climax avec une boîte de vitesse issue de la MGA. La voiture est présentée en 1957 au salon de l’automobile de New York et Ray Saidel devient l’agent de TVR aux Etats-Unis. Elle enregistre un franc succès et déjà plusieurs commandes sont passées, en tout cas beaucoup plus que la capacité de production de l’usine à Blackpool. En effet celle-ci étant destinée à produire des kits qui représentaient les ¾ des ventes, elle ne pouvait fabriquer des voitures, même en petite série.
TVR Jomar Coupé
1958 : Le premier modèle de série : La « Grantura »
Malgré tout, ce succès permet à TVR de développer son activité et en 1956, elle fabrique ses propres carrosseries en fibre de verre, la seule solution pour maintenir des coûts raisonnables pour une si petite production, et continue d’affiner les lignes de la Jomar. 2 ans plus tard le style TVR apparaît avec le nouveau modèle : La Grantura. Ce design sera conservé et décliné pendant plus de 20 ans sur les modèles suivants.
TVR Grantura (mk2 en l’occurrence)
La Grantura est proposée avec un large choix de moteur (Coventry Climax type FWA et type FWE, Ford 100E, BMC B-Series) rendu possible grâce à la grande accessibilité de son compartiment moteur. Pour le reste elle fait appel à des pièces toujours issues des grands constructeurs comme par exemple une direction Ford, des freins tambour d’Austin Healey ou des jantes à rayons et écrou central Dunlop. La ligne issu de la Rochedale a évolué et trouve sa forme définitive à force de retouche et de modification toute empirique.
La première crise
Grâce à l’apport financier de nouveaux associés, les locaux sont transférés dans une ancienne briqueterie en banlieue de Blackpool où TVR peut raisonnablement envisager une production de série. Le succès est au rendez-vous avec ce modèle et le carnet de commande se remplit, malheureusement la production ne suit pas, les commandes finissent par être annulées (même Ray Saidel n’arrive pas à stopper ce phénomène de son côté de l’atlantique) et l’entreprise se retrouve rapidement confrontée à des difficultés financières. Heureusement un groupe de propriétaires généreux et enthousiastes, investit en espèce dans la marque, sauvant l’entreprise du naufrage. A noter que ce genre de sauvetage jalonnera l’histoire de la marque ; les clients eux-mêmes venant au secours de la marque aux 3 consonnes. TVR est alors renommée Layton Sports Car et continue sa production jusqu’au nouveau drame financier de 1961. Un nouveau plan de sauvetage est alors mis en place et la compagnie est renommée TVR Cars avec Trévor Wilkinson comme directeur général
La première « grosse » TVR : La « Griffith »
En 1961, TVR rétablit son marché aux Etats-Unis en nommant Dick Monnich comme agent. TVR vend à nouveau ces modèles aux Etats-Unis et très rapidement l’idée de mettre un V8 dans une Grantura a titillé les américains. Ainsi en 1963 un concessionnaire automobile américain (propriétaire d’une Grantura mk3) qui déjeunait avec Caroll Shelby, a prétendu à celui-ci qu’il était capable de monter le même V8 Ford que les AC Cobra (le 289) dans la Grantura et de surpasser celle-ci. Cet américain ressort de son déjeuner et décide d’aller au bout de son raisonnement. Il s’empresse d’essayer le montage dans une Grantura mais ce fut un échec. Qu’à cela tienne, ce monsieur persévère et demande directement à TVR de lui fournir un châssis sans moteur ni transmission, ce que TVR fait bien évidemment. Au final en retirant des éléments de suspensions et en martelant le châssis pour faire rentrer la nouvelle transmission, il réussit à installer tout ce petit monde sur le châssis. Autant vous dire que la Grantura est transcendée. Le nom de cet américain fou (aussi fou que Caroll Shelby) : Jack Griffith.
Il existe aussi d’autres versions de la naissance de la Griffith :
- Ainsi une Grantura et une AC Cobra se seraient retrouvées côte à côte dans les ateliers de Jack Griffith. Les mécaniciens se seraient alors lancé le défi de faire rentrer le V8 de la Cobra dans la Grantura……..et il est rentré.
- Dick Monnich et Jack Griffith auraient décidé que tout ce que Caroll Shelby faisaient avec une AC, ils pouvaient le faire en mieux avec une TVR. S’appuyant sur une Grantura mk3 1800, ils auraient remplacé le bloc BMC B-Series 1800 par un V8 Ford 289.
Où se trouve la vérité ? C’est difficile à dire, le plus simple étant de choisir la légende qui vous plaît le plus, moi j’ai une préférence pour la première !
TVR, enthousiasmée par l’idée, décide de soutenir Jack Griffith dans l’aventure en lui fournissant des châssis. Après quelques travaux de développement, TVR se met aussi à construire ses propres Grantura avec le même V8 Ford 289. TVR les appellera Griffith 200, à noter qu’aux Etats-Unis elles sont commercialisées sous le nom de Griffith série 200 sans la marque TVR et avec un logo différent. Cette différence de nom semble venir du fait que TVR ai livré à Jack Griffith des kits qui étaient assemblés aux USA et commercialisés séparément du réseau de vente des TVR Grantura de Dick Monnich. Elle est proposée avec 2 motorisations : Le V8 289 en version « normale » qui développe 195 ch ou une version HiPo (High Powered) qui développe 271 ch (le 0-60 mph est abattu en 3,9s dans cette version !). La demande fut telle pour cette concurrente de l’AC Cobra que l’usine fut rapidement submergée de commandes, et la production se trouvait accaparée par la réalisation des éléments de la Griffith.
TVR Griffith (le bossage dû au V8 permet de les distinguer des Grantura)
En 1964, la Griffith 200 est remplacée par la Griffith 400 qui est équipée de série du 289 HiPo. Elle reçoit dorénavant un différentiel Salisbury avec un rapport de réduction plus long lui permettant d’atteindre une vitesse plus élevée que la Griffith 200. Le refroidissement a aussi été amélioré. La Griffith 400 semblait destinée à une belle carrière, malheureusement une grève des dockers de la côte Est en 1965 couplée à des difficultés de livraison par l’usine de Blackpool des éléments pour fabriquer la Griffith 400 et la mauvaise presse de la Griffith 200, firent que celle-ci fut produite en très faibles quantités. Cette même année, la production s’arrête, Martin Lilley à son arrivée chez TVR continuera d’en produire d’avril 1966 jusqu’au début de l’année 1967.
Ces difficultés aux Etats-Unis eurent aussi raison d’un autre projet de Jack Griffith : La 600. Cette voiture n’a rien à voir avec TVR, en effet elle ne reprend aucun élément issu de la TVR Grantura ni d’aucune autre TVR. Pour l’histoire elle a changé plusieurs fois de nom : A sa présentation elle s’appelait Griffith 600, puis Omega et enfin Intermeccanica Italia. Le châssis et la carrosserie ont été conçus par Intermeccanica de Franck Reisner en Italie. Le châssis s’appuie sur celui de l’Apollo-Buick et le moteur est un V8 Plymouth de la Barracuda 1ère génération. La 600 a connu les mêmes difficultés d’approvisionnement (grève des dockers) que la 400, même si Jack Griffith a essayé de contourner le problème en utilisant le transport aérien mais sans véritable succès. Au final 14 exemplaires de la 600 seront produits.
Griffith 600
Les débuts officiels en compétition
Malgré ces difficultés pour la Griffith, le développement de la Grantura a continué en parallèle. Ainsi en 1962, la mk3 est présentée avec des éléments de suspension d’origine Triumph. C’est avec cette version de la Grantura que TVR décide de s’engager dans la compétition, auparavant plusieurs TVRs avaient déjà été engagées par des propriétaires privés. TVRs aligne 3 Grantura aux 12 heures de Sebring et 3 autres Grantura (n°31, n°53 et n°65) aux 24 heures du Mans. L’aventure du Mans va se révéler désastreuse !
La peinture n’est pas encore sèche quand les voitures quittent l’usine !!!, Vers Birmingham les ennuis commencèrent sur une des voitures de course, conduite pour le voyage par Ken Richardson, avec des problèmes de réservoir d'essence (des débrits de soudure se baladaient dans le réservoir et avaient été aspirés dans le tube allant à la pompe à essence !) ce qui obligeait le convoi à s'arrêter fréquemment. Enervé, Richardson, ayant oublié que sa voiture avait des freins compétition (qui devaient être chauds pour bien fonctionner), passa à travers le dernier rond-point de l'autoroute M1, sans dommage heureusement. Arrivé près du Mans, ils cherchèrent un garage pour résoudre le problème d'arrivée d'essence, le garagiste constata que le réservoir était en bon état, les mécanos d'assistance pensèrent que l'essence était « contaminée » et vidangèrent la TVR et cela plusieurs fois ! Enfin un des mécanos eu l'idée de changer le tube entre le réservoir et la pompe à essence ! Au final seul 2 TVRs (n°31 et n°65) se retrouvèrent sur la piste pour les essais, malheureusement, elles se mirent à chauffer dès leur premier tour d'essai, à la fin des Hunaudières. Le jour de la course, l'ambiance était morose, une seule TVR (n°31) était sur la ligne de départ et Peter Bolton ne fit que 3 tours quand la voiture se mit à chauffer et abandonna !
Les 2 Grantura engagés au Mans 1962
Le départ de Trévor Wilkinson
Cette expérience coutât une fortune à TVR et on ne les revit plus ses voitures au Mans…. avant longtemps, pour être précis 41 ans (voir plus bas). D’une manière générale la compétition fut un gros flop pour TVR, avec des voitures sous développées et mal préparées pour l’endurance qui s’avérèrent peu fiables sur la piste, et un coup dur pour ses finances. Une fois de plus TVR se trouve dos au mur, Trévor, réalisant qu’il avait perdu le contrôle de l’entreprise qu’il avait fondé, quitte la société en 1962 en vendant ses parts. Un plan de sauvetage (encore un) est mis sur pied par 2 administrateurs de TVR, des passionnés de la marque et un héritier d’une entreprise de vêtement, Arnold Burton. TVR s’appelle désormais Grantura Engineering. Rapidement le choix de motorisation est réduit et en 1963 un seul moteur est proposé le BMC B-Séries de 1798 cm3. Le design arrière évolue et cette version est appelée mk3 1800S.
Arrière d’une Grantura mk3 1800S
Une TVR italienne : La Trident
Au début de l’année 1963, un homme appelé Trevor Frost rencontre l'équipe de gestion de Grantura Engineering au Pub « Derby Arms », situé à Treales près de Blackpool pour discuter d'un projet qu'il avait imaginé pour un nouveau modèle TVR. Frost est un créateur anglais d'origine italienne et à l'époque, il travaillait à la « Carrosserie Fissore », une entreprise de design à Turin, sous le nom de Trevor Fiore. Assis à une table, Frost dessine son idée sur une serviette de table. Les représentants TVR sont impressionnés. Frost retourne à Turin pour persuader la « Carrosserie Fissore » de construire 2 prototypes de la voiture sous le nom de TVR Trident.
La TVR Trident est un coupé fastback, pas très différente en apparence des Wedges qui apparaîtront beaucoup plus tard. Elle s’appuie sur le châssis des Grantura / Griffith, reçoit une carrosserie en acier avec un capot en aluminium et est motorisé par le V8 Ford de 4,7 litres de 270 ch (le même que celui qui équipait les Griffith 400) associé à une boîte 4 vitesses. Les pneus étaient des Dunlop 72. Cependant le passage du simple dessin sur une serviette de table à une voiture réelle ne fut pas évident et il fallut attendre 2 ans avant que le projet ne prenne forme. Toutefois, les deux prototypes furent terminés à temps pour le salon de l’automobile de Genève de 1965, où elles furent bien accueillies par le public. Les prototypes présentés étaient équipés de nombreuses pièces italiennes : phares arrières et de nombreux accessoires intérieur d’origine Alfa Roméo, les feux avant et les commutateurs électriques étant d’origine Fiat. La nouvelle TVR reçut un accueil chaleureux de la presse spécialisée et le Daily Mail qualifia même la Trident de « plus belle voiture du monde ». A la fermeture du salon de Genève, TVR avait enregistré plus de 150 000 £ de commandes.
TVR Trident n°3
Suite à la présentation au salon de Turin, TVR demande à la « Carrosserie Fissore » de construire 2 voitures supplémentaires, un autre coupé ainsi qu’un cabriolet. Les 2 prototypes présentés au salon deviennent officiellement les voitures de test de TVR sur lesquels les modèles de production doivent se baser. En août 1965, avant même que Fissore ne livre les deux Trident 3 et 4, les espoirs et les rêves de TVR partent en fumée à cause des problèmes rencontrés aux Etats-Unis avec les grèves de 1965 qui entraînent une chute des ventes de Grantura et Griffith Outre-Atlantique. La Trident représentait un investissement financier majeur pour TVR et la perte soudaine d’une clientèle importante aux Etats-Unis conduisit TVR tout droit vers la faillite en cette année 1965 pour la 2ème fois de son histoire. C’est en cette année 1965 que Martin Lilley rachète TVR (nous développons cette partie dans le paragraphe suivant).
Mais qu'est devenue la Trident pendant ce temps? Durant les mois nécessaires à la reprise en mains par Martin Lilley, un flou est intervenu concernant les droits de fabrication de la Trident. Appartenaient-ils à TVR, à Fissore ou tout simplement à Frost? TVR devait de l'argent au « Carrosserie Fissore » et à Frost qui craignaient tous les 2 de lourdes pertes. Un concessionnaire TVR du Suffolk, Bill Last, approcha la « Carrosserie Fissore » pour obtenir les droits de la TVR oubliée. On ne sait pas quelle fut la nature de la transaction, mais toujours est-il que Last s’appropria les droits. Cela lui permit de commander une nouvelle voiture à la « Carrosserie Fissore » et de la commercialiser sous la marque Trident. Le design de la voiture différait sensiblement de la TVR Trident car il reposait sur un châssis d'Austin Healey 3000. De plus la carrosserie était en fibre de verre et non plus en acier. Entre 1966 et 1976 Trident Cars et son successeur Trident Motor Company construisirent 130 voitures.
La Trident fut perdue pour toujours par TVR en 1966. Heureusement Martin Lilley alla récupérer les restes des numéros 3 et 4 chez la « Carrosserie Fissore » et termina les voitures à l'usine. Le cabriolet devint même la voiture personnelle de Martin Lilley pendant un temps.
TVR Trident n°4 Cabriolet
Probablement en raison de leur caractère unique, chaque Trident fut conservée par son propriétaire. Les n°1 et 2 partirent aux USA pendant que les 3 et 4 restèrent en Grande Bretagne. Aujourd'hui les 4 voitures ont survécu, en grande partie grâce aux efforts de Chuck Lynn, un ancien propriétaire de TVR Trident. Très récemment le coupé n°2 et le cabriolet n°4 ont été vendus à 2 Belges. La moitié de la production TVR Trident est donc maintenant localisée en Belgique et il semblerait que les propriétaires actuels souhaitent les garder pour toujours. Après tout la TVR Trident n'est pas seulement une TVR unique c'est aussi une pièce unique de la production britannique de voitures de sport.